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Je suis née parmi les pinceaux, les couleurs. Mon père était photographe, ma mère miniaturiste. Les appareils photos, les tubes de peinture étaient des jouets naturels. Puis, au moment des premières sensibilités de l’adolescence, la maladie a réduit mon monde aux livres et à la vue sur la Centrale de Nîmes. Ma première sortie après quatre mois d’enfermement a été le plus beau des feux d’artifice, la lumière, les couleurs, le moindre souffle de vent, tout a été révélation et depuis je suis exploratrice de la vie.
La sieste
Le passant se fait rare
et rase les murs.
Les platanes crient, la ville se tait.
Le passant hésite,
cherchant l’ombre pour chemin.
Un volet trop tardif grince
puis tourne son dos au soleil.
« A quoi bon? »
Ce qui était important
Le passant soupire,
voici le banc de délivrance.
Le grand jet d’eau
tisse son arc-en-ciel.
Le passant renonce.
Les platanes murmurent, les platanes tremblent, le regard sombre.
Canal de la Fontaine, Nîmes, août,
pastel doux
Le Jardin secret
Je descends de la claire Tour Magne
en chantant
Je saute les caniveaux pierreux
je cours sur les chemins ombreux
en chantant.
Et le temps s’envole, vole!
Je marche dans le Jardin secret
en rêvant,
j’apprends face à la ville
en rêvant,
je m’assois près de la Fontaine
en rêvant.
Et le temps vole, vole!
Je guette au pied de la cathédrale place de la cathédrale,
et j’attends, Nîmes, pastel doux
je traîne dans les rues Renaissance
et j’attends,
je cherche sur les grands boulevards
et j’attends.
Et le temps vole, vole!
L’amour est venu
et le doute aussi.
et j’ai vécu
l’aventure, la joie, la peine.
Je reste de même,
habitée
par ma petite chanson,
mes rêves, mes attentes,
l’enfant fragile
en mon jardin secret.
Et le temps vole, vole, vole…
place de la Maison carrée, Nîmes, pastel doux
Quand j’étais petite:
La Reine des Neiges
Dans son pyjama trop grand
ses yeux baignés de sommeil
elle offre son visage à l’aube.
Petite fille tu as froid
et tu rêves de la Reine des Neiges
qui dans ses dentelles de givre
t’attire.
Tu plonges ton regard
dans les tours de cristal
le renard blanc
qui court sur ta pupille.
Ton index suit tes songes
que ton souffle
efface doucement.
Les images se mêlent, se défont
ton monde se révèle.
Au delà de la vitre, l’aube est grise
et les murs dressés sont ceux
d’une prison.
Il s’agit de la Centrale de Nîmes transformée en fac de droit!
Les hirondelles
C’est un vieux balcon
rambarde rouillée
tommettes brisées.
Ce sont de vieux murs
crépis arrachés
briques dénudées.
Le soir prend pitié
jette son ombre
sur la façade
dépose un baiser
douceur du pastel
tendresse de rêve.
Voici dans ce rêve
chaussons fatigués
pyjama trop grand
deux longues tresses
des yeux sérieux
au reflet des cieux.
Et là, merveille,
la course folle
des hirondelles
en myriades,
innombrables
reines de la vie.
La vie pour elles,
cruelles chasseuses,
du cri terrible
de toutes les guerres
elles annoncent
la mort de leur proies.
Que c’est étrange
hésite l’enfant
la vie, la mort
un tel spectacle!
le soir, la nuit
tout ça pourquoi?
L’enfant a grandi
encore un soir
d’une terrasse
de méditerranée
douceur de pastel
tendresse du rêve
L’enfant a veilli
marché dans la vie
où sont donc passées
les hirondelles
plus de moustiques
plus de cris du soir.
La vie et la mort
les rêves d’enfants
eux, sont toujours là.
Place de l’horloge
c’est là mon poste de guet.
Assise sur le fauteuil de rotin
je lis, j’écris, je peins
tandis que l’arabesque
de mon café se dissous
dans l’air frais du matin.
Et l’horloge est en retard.
place de l’horloge, Nîmes,
pastel doux, la Toussaint
Le soleil se glisse
sur les tuiles romaines
plonge sur la place
joue à l’arc-en-ciel
sur la main du gamin
qui rit derrière le jet d’eau.
Et l’horloge est en retard.
Le soleil frappe la tour
de pierre blanche du Gard
phare qui jaillit du bleu
des vieilles rues de Nîmes.
Le marché se réveille
je suis à la peine.
Tu es en retard.
place de l’horloge, Nîmes,
pastel doux, la Toussaint
Plein Sud
C’est le Sud,
pas la Provence,
pas le Languedoc.
La ville a sa propre dance,
la ville a son propre roc.
C’est le plein sud,
quand l’été craque le ciel,
quand l’été fend la terre
la ville souffre en silence,
la ville est en état de choc.
Nîmes, août
La chaleur
La terre craquelle,
L’herbe roussit,
les branches se dénudent.
Les cigales chantent,
les oiseaux se taisent.
J’avance sur le chemin,
tout est immobile.
Je lève les yeux,
le ciel m’écrase.
Nîmes, août
chez mon frère, Nîmes, pastel doux
chez mon frère, Nîmes, aquarelle
chez maman, Nîmes,